portrait XVIème siècle
"C'est dans l'abîme de cette ténèbre
où l'esprit aimant est mort à lui-même, que
commencent la révélation de Dieu et la vie éternelle.
Car c'est là que brille et qu'est engendrée une
lumière incompréhensible, le Fils de Dieu même,
en qui l'on contemple la vie sans fin. En cette lumière
l'on devient voyant; et cette lumière est donnée
à l'esprit en son existence simple, là où
il reçoit la clarté qui est Dieu même, au-dessus
de tous les dons et de toute uvre de créature, en
ce vide tout affranchi de l'esprit, où par le moyen de
l'amour de fruition, il s'est perdu lui-même et reçoit
sans intermédiaire la clarté divine, tout transformé
aussitôt en cette clarté même qu'il reçoit." |
Jean de Ruysbroeck
(Jan van Ruusbroec) est né en 1293 dans un village du
Brabant (« Ruusbroec ») aujourd'hui englobé
dans l'agglomération bruxelloise. À onze ans, il
décide de quitter la maison de ses parents pour étudier
sous la direction de son oncle, chanoine de Sainte-Gudule, à
Bruxelles. Les humanités ne l'intéressent guère
: « C'était un homme ignorant, rapporte Denys le
chartreux, qui ne savait seulement pas le latin. » Et un
autre chartreux souligne que « c'est à peine s'il
apprit la grammaire ». Ordonné prêtre à
vingt quatre ans , il devient chapelain de Sainte-Gudule : «
Peu soucieux de lui-même et du monde, note son biographe,
il faisait l'effet d'un malheureux et d'un homme de rien à
ceux qui ne le connaissaient pas. Il vivait dans une paix profonde,
silencieux et négligé. Adonné à la
contemplation, il évitait volontiers les foules. »
De cette époque sont datés ses premiers ouvrages,
écrits en moyen-néerlandais, ce qui étonne
beaucoup ses contemporains. Mais voici qu'à l'âge
de soixante ans, Ruysbroeck décide de changer d'existence.
Avec son oncle et quelques amis, il se retire au milieu de la
forêt, en un lieu nommé Groenendael (« la
Vallée verte »). Tous prennent bientôt l'habit
des chanoines réguliers de saint Augustin dont ils adoptent
la règle. Les livres et la réputation de Ruysbroeck
se répandent largement. Laïcs et religieux, théologiens
et simples fidèles affluent de plus en plus nombreux pour
l'entendre. Parmi eux aurait été le Strasbourgeois
Jean Tauler. Ruysbroeck meurt le 2 décembre 1381 à
quatre vingt huit ans. Il a été béatifié
cinq siècles plus tard, en 1885. |