« Lesprit est
lacte créateur ; lesprit crée un être
nouveau. Lactivité créatrice, la liberté
créatrice du sujet est primitive. Le principe de causalité
ne sapplique ni à lesprit ni à la vie
spirituelle. Lesprit est de Dieu, et lesprit mène
à Dieu. Lhomme reçoit tout de Dieu par lesprit
et cest par lesprit que lhomme donne tout à
Dieu, quil multiplie les dons quil a reçus,
quil crée ce qui nexistait pas auparavant.
Lesprit vient de Dieu. Lesprit nest pas créé
par Dieu comme lest la nature, il émane de Dieu,
il est versé, insufflé par Dieu à lhomme
».
|
Nicolas Berdiaev est
né près de Kiev, dans une famille de la haute aristocratie,
où il passa son enfance et son adolescence. A vingt ans
il devient marxiste, et est emprisonné pour menées
révolutionnaires en 1898. De retour à Kiev, il
se tourne vers la religion orthodoxe, sous linfluence de
Serge Boulgakov. En 1907, il connaît une illumination qui
orientera tout le reste de sa vie. Cest sans doute cette
« lumière non crépusculaire » dont
parle Soloviev qui invite à « se mettre en route
», en sa direction. Cest de cette époque que
date son admiration pour Jacob Boehme. Vint la révolution
de 1917. Nommé membre du Conseil provisoire de la République,
il se détourne rapidement de lactivité politique,
est nommé ensuite vice-président de lUnion
des Écrivains et professeur à luniversité
de Moscou. Ses ennuis avec le régime commencent en 1920,
et il sera finalement expulsé de Russie, en 1922, «
pour des raisons idéologiques et non politiques ».
Commence lexil, à Berlin dabord, de 1922 à
1924, puis à Paris où il vécut jusquà
sa mort. Berdiaev décrit sa méthode philosophique
comme «intuitive et aphoristique plutôt que discursive
et systématique». Sa conception du monde repose
sur le concept d'Urgrund, mystérieuse liberté primordiale
d'où émerge Dieu. De cet Urgrund, ou potentialité
incréée, Dieu crée les hommes, êtres
spirituels dont la liberté et la faculté créative
sont de la plus haute importance pour Berdiaev. Il fut dénommé
le philosophe de la liberté. Son souci majeur était
de libérer la personnalité de toutes les entraves
à la liberté de la créativité. Aussi
se battait-il contre la «société collectivisée
et mécanisée», imaginant une communauté
où les relations religieuses, sociales et politiques viendraient
rehausser la liberté personnelle. Berdiaev était
persuadé que la créativité est destinée
à échouer tragiquement dans ce monde déchu.
Cependant, ll croyait en l'avènement final du royaume
de Dieu, événement auquel tend l'activité
créative du chrétien, engagé dans un dialogue
avec Dieu. |